La date de la détention provisoire détermine le régime applicable en matière de remises de peine
Tout auteur d’infractions condamné à une peine d’emprisonnement devenue définitive bénéficie de remises de peine tout au long de son incarcération, ce qui signifie que la durée de la peine réellement effectuée par l’auteur sera théoriquement réduite par rapport à cette prononcée par la Juridiction pénale.
Jusqu’à la Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, deux catégories de remises de peine étaient applicables : les « crédits de réduction de peine » automatiquement déduits de la peine, sans conditions, et les « réductions de peine supplémentaires » octroyés chaque année tout au long de la peine en fonction des « efforts de réadaptation sociale du condamné » (ex. soins, indemnisation des victimes, travail en détention etc.)
La loi du 22 décembre 2021 a supprimé les crédits automatiques de réduction de peine institués par la Loi du 9 mars 2004 et a instauré un nouveau système de remises de peine applicable à partir du 1er janvier 2023.
Ainsi, à compter de cette date, et conformément au nouvel article 721 du Code de procédure pénale, les juges de l’application des peines peuvent, après avis de la Commission de l’application des peines, octroyer jusqu’à six mois de réduction de peine par an aux condamnés manifestant « une bonne conduite » et des « efforts de réinsertion » (exclusion faite des auteurs d’actes de terrorisme).
Seul le comportement du condamné peut déterminer aujourd’hui s’il peut bénéficier de remises de peine, de sorte qu’en cas de mauvaise conduite et/ou s’il ne manifeste aucun effort de réinsertion tout au long de sa peine, le condamné pourra effectuer l’intégralité de la peine prononcée par la Juridiction pénale.
Quand une nouvelle Loi entre en vigueur, il existe toujours des interrogations quant à son application aux affaires en cours.
En effet, l’article 112-2 3° du Code pénal prévoit que sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur :
« 3° Les lois relatives au régime d'exécution et d'application des peines ; toutefois, ces lois, lorsqu'elles auraient pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées par la décision de condamnation, ne sont applicables qu'aux condamnations prononcées pour des faits commis postérieurement à leur entrée en vigueur ».
In fine de l’article 721 du Code de procédure pénale mentionné ci-dessus, il est indiqué que les nouvelles dispositions de la loi du 22 décembre 2021 sont applicables aux personnes placées sous écrou à compter du 1er janvier 2023, quelle que soit la date de commission de l'infraction, étant précisé que les personnes placées sous écrou avant cette date demeurent soumises au régime défini aux articles 717-1, 721, 721-1, 721-1-1, 721-2 et 729-1 du code de procédure pénale dans leur rédaction antérieure à ladite loi.
La pratique pénale a permis de démontrer que les choses n’étaient pas toujours aussi simples…
Par exemple, quid de la détention provisoire potentiellement effectuée en amont de la condamnation de nos clients ?
Jusqu’à l’arrêt rendu par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation le 26 juin 2024 (pourvoi n°23-87.131), les professionnels du droit (juges de l’application des peines, greffiers, conseillers d’insertion et de probation, avocats etc.) considéraient que la date à retenir pour l’applicabilité de ce nouvel article et donc du nouveau régime était celle de la condamnation définitive de l’auteur, et ce peu importait la détention provisoire éventuellement exécutée avant l’entrée en vigueur de la Loi n°2021-1729.
Dès lors, certaines administrations pénitentiaires et magistrats appliquaient l’intégralité du nouveau régime à une peine, exécutée en amont sous détention provisoire avant le 1er janvier 2023, alors que d’autres calculaient les remises de peine en deux temps : une première période allant de la date du mandat de dépôt jusqu’au 1er janvier 2023, puis à compter du 1er janvier 2023 jusqu’à la fin de la peine.
Autrement dit un véritable casse-tête juridique !
Toutefois, la Chambre Criminelle a néanmoins précisé dans le cadre d’une affaire où un auteur avait été condamné après le 1er janvier 2023 mais placé en détention provisoire avant cette date que c’était la date de mise sous écrou qui devait permettre de déterminer quel était le régime de remise de peine applicable.
En effet, selon la Chambre Criminelle « l'article 59, VI, de ladite loi [de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021] régit les modalités d'entrée en vigueur de ce nouveau régime. Il prévoit qu'il est applicable aux personnes placées sous écrou à compter du 1er janvier 2023, quelle que soit la date de commission de l'infraction, les personnes placées sous écrou avant cette date demeurant soumises au régime antérieur du crédit de réduction de peine.
Par ailleurs, l'article 724 du code de procédure pénale dispose que sont placées sous écrou les personnes qui exécutent une peine ou sont placées en détention provisoire.
Il en résulte que le nouveau régime de réduction de peine est applicable aux personnes incarcérées à compter du 1er janvier 2023, celles incarcérées avant cette date relevant de l'ancien régime, qu'elles aient été écrouées au titre de la détention provisoire ou en exécution de peine ».
Nous ne pouvons que nous satisfaire de la clarté d’une telle décision.
Par extension, nous pouvons donc penser qu’une condamnation à de l’emprisonnement prononcée par une Juridiction avant le 1er janvier 2023 mais mise à exécution après cette date conduirait à l’application du nouveau régime de remise de peine. A moins que la Cour de Cassation ne considère l’ancien régime de remise de peine plus favorable au condamné… Affaire à suivre.


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